Genres revendiqués et exprimés

« Passing » : Un regard sur nous-même pour trouver son équilibre !

Crédit photo : Fotolia

Se construire une image genrée est un comportement bien ancré dans nos sociétés, et la réalité d’aujourd’hui n’échappe pas à cette règle. Cela nous amène donc à nous interroger sur cette image que l’on offre au regard de l’autre, le genre perçu, afin d’obtenir une reconnaissance et une acceptation de notre identité de genre, ce que l’on appelle le « Passing ».

Le « passing », au fait, qu’est ce que c’est ?

C’est un terme anglo-saxon, signifiant le fait d’être perçu.e, aux yeux des autres, en tant que membre du genre revendiqué. Un genre dans lequel la personne transgenre n’a pas été élevée au regard des organes génitaux et/ou de l’état civil.

Le « passing » tient à la fois de l’ordre de l’apparence corporelle ainsi que du comportement. Il est fortement lié aux stéréotypes culturels de genre qui structurent les interactions humaines. Et la reconnaissance de l’identité de genre, sa perception par l’autre, tient beaucoup de la manière dont on s’accapare l’ensemble de ces codes. Ces paramètres nous amènent, au final, à relativiser l’importance de l’aspect corporel dans la reconnaissance du genre exprimé et perçu. Si le corps peut être un outil utile, il a ses limites. Et surtout il n’est pas le but ultime pour s’assurer une reconnaissance sans faille de notre identité de genre.

Se poser la question de l’objectif que l’on met dans ce « passing » peut être pertinent dans la manière de s’assumer. Est-ce en premier lieu pour nous sentir et se savoir plus ou moins invisible en tant que personne transgenre ? Est-ce pour faire reconnaître notre identité de genre ? Les deux à la fois ? De la réponse ressortira des pistes sur les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir. Savoir de quelles habitudes genrées acquises lors de l’éducation on veut se débarrasser ou garder, celles que l’on veut développer du genre revendiqué, voire s’engager vers des modifications corporelles en connaissance de cause, font partie de cette réflexion personnelle.

Faire reconnaître son identité de genre

Angoisse que beaucoup de personnes transgenres débutantes ont sans doutes vécues, le « passing » est ainsi, à la base, un simple moyen de se faire accepter comme membre du genre revendiqué. Idéalement c’est donc faire reconnaître au premier regard notre genre ressenti avec l’aide du genre exprimé. Si le genre perçu correspond au genre revendiqué, c’est gagné !

photo de foule
Crédit photo : Fotolia

Le « passing » peut être abordé comme un moyen de ne pas être détecté en tant que personne transgenre. Allant jusqu’à faire l’impasse sur l’équilibre de notre propre identité de genre. Cette situation se retrouve souvent lorsque l’on commence à assumer son genre. On expérimente les codes dans un premier temps puis, ensuite, on trouve son équilibre personnel dans le genre revendiqué. De cette manière, on s’approprie le « point de confort » qui nous convient et cela annonce une fin de « transition » sociale. C’est un peu le même processus que l’adolescence. Le genre perçu peut être plus important que le genre revendiqué, c’est le cas par exemple lorsqu’on surjoue le genre. Et parfois malheureusement cela peut nuire au « passing » lorsque cela sort du comportement culturel habituel.

Mais, parfois, cette stabilité est plus difficile à trouver pour de multiples raisons (peur d’être repéré.e dans des situations sociales compliquées, adhésion à des stéréotypes, performance, etc.) repoussant le moment ou l’on trouve le confort de son équilibre de genre. Parfois, faire la part des choses entre contraintes sociales et genre revendiqué est une donnée importante. Par contre cela doit dépendre du moment et de l’interaction sociale recherchée. Le genre et son expression ne sont pas figées et il faut en jouer pour s’assurer du genre perçu adéquat. Reprendre des codes de genre, corporels ou comportementaux, uniquement par conformisme et de manière rigide devient compliqué à long terme…

Autre paramètre à ne pas négliger : la personne concernée est la plus mal placée pour juger de son propre « passing ». Avoir une image objective de soi-même en laissant de côté tout affect n’est pas si facile… Se regarder dans un miroir est une chose, se juger et se jauger avec lucidité en est une autre. Surtout en situation de fragilité.
Il ne faut pas oublier que le « passing » ne consiste pas à se convaincre soi-même mais à convaincre les autres !

Faire reconnaître son genre, c’est bel et bien être perçu.e du genre que l’on ressent. Tout en incluant dans cette construction personnelle les paramètres de notre culture. Trouver l’expression de genre qui convient pour faire reconnaître son identité de genre, cela s’expérimente et s’apprend avec le temps en observant autour de nous, ancré.e dans le réel. On tâtonne certes au début, puis, lorsque l’on s’assume « H24 », on prend de l’assurance et cela vient ensuite naturellement.

Le « passing » n’a ainsi rien à voir avec « une mise en conformité » avec des critères de beauté, d’idéal corporel, de stéréotypes comportementaux ! C’est un « mélange de caractéristiques » propre à chacun.es qui a pour bases la réalité quotidienne et la sincérité du genre exprimé.

Au final, à travers cet exercice en fait temporaire du « passing », le but est de trouver cet équilibre personnel entre le genre revendiqué et le genre exprimé. En jouant et s’appropriant des codes culturels pour au final avoir un genre perçu correspondant au genre revendiqué !