Et après …

Gérer « l’après »…


Parler de « l’après » n’est pas souvent évoqué et il n’est pas non plus aisé de se projeter si loin dans le futur tant il peut y avoir de difficultés et d’interrogations lorsque l’on commence à s’assumer. Mais il est utile d’inclure dans ses réflexions cette question de la gestion de notre diversité une fois que l’état civil est modifié, une fois que l’on a trouvé son équilibre apparence physique / identité de genre.

Il ne faut pas s’imaginer que toute difficulté et discrimination seront enfin terminées, reléguées à un passé qui a été plus ou moins compliqué à appréhender. Si vous pouvez désormais vous épanouir et vous accomplir, votre transidentité ne disparaît pas comme par enchantement et reste une réalité de votre vie.

Ainsi, par exemple, sachez que votre état civil sur votre acte intégral de naissance conserve vos mentions de sexe et prénoms de naissance, que votre corps ne correspond pas à la binarité biologique mâle/femelle hétéro-normée (vos caractéristiques biologiques attestent plus ou moins avec évidence de votre genre et « sexe » assignés à la naissance), que vous avez côtoyé des personnes avant d’assumer votre genre revendiqué. Et ces données et faits peuvent resurgir à tout moment dans votre vie, sans pouvoir en avoir vraiment le contrôle, et cela d’autant plus que vous avez assumé votre genre tardivement.

Vie Privée, vie publique

Il est tout à fait normal de ne pas faire étalage de votre transidentité dans la vie courante : on n’a pas besoin de dire que l’on est une personne transgenre quand on va acheter du pain, aller à la médiathèque de notre ville, louer un appartement, etc. De même, il est tout aussi normal de ne pas l’étaler systématiquement sur les réseaux sociaux. Cela relève de notre vie privée. Le dire doit relever d’un acte personnel et réfléchi. Bref, préserver sa vie privée est un enjeu important, mais cela ne signifie pas forcément vouloir se cacher et rejeter son passé. Des circonstances particulières vous obligent parfois à vous affirmer en tant que personne transgenre…

Au delà des « coming out » familiaux et professionnels nécessaires, par exemple, on peut être obligé.e de parler de son identité de genre à son médecin traitant, mais pas forcément à son dentiste ou à son ophtalmologue. Autre situation, pour les MtF, lors d’une prise de sang pour analyse, on peut vous demander quand vous avez eu vos dernières règles… A vous de répondre en éludant le sujet... ou pas.
Gérer la frontière, vie privée / vie publique concernant sa transidentité est un travail à faire sur soi-même dès le début afin de ne pas être surpris.e pas des déconvenues chez un médecin, chez un notaire, faire reconnaître des diplômes, une filiation, des droits à retraite et pension, ou… lors des réunions de famille, voire pire au niveau des réseaux sociaux !

Réseaux sociaux

Les réseaux sociaux font désormais partie de notre vie quotidienne. Nous avertissons les personnes transgenres qui parlent facilement de leurs « transitions » sur les réseaux comme Facebook, Twitter, WhatsApp, SnapChat, etc, des conséquences de leurs publications. Le fait d'utiliser ces applications est devenu tellement banal que l'on en oublie leurs portées.

Dans un premier temps, vous êtes de fait totalement dépossédé.e de la propriété et de l’usage de vos publications. Ce que vous éditez peux ainsi continuer de circuler voire être utilisé sans votre autorisation et, pire encore, sans que vous en ayez connaissance. Cette perte de souveraineté de vos données n’est pas forcément la bienvenue lorsque vous commencez à vivre votre transidentité, et encore moins une fois que vous vivez pleinement votre identité de genre, votre « transition » terminée… Votre vie privée n’est alors plus forcément maîtrisée et des "comings out" non désirés et harcèlements peuvent en découler.

Il faut donc prendre conscience de la frontière vie privée / vie publique, d'évaluer les risque que vous pouvez être amenés à prendre et savoir en fixer vos propres limites en fonction de votre ressenti, de vos activités privées et professionnelles, de votre implication militante.

La transphobie ne disparaît pas pour autant

Comme on a pu le constater, préserver sa vie privée au sein de la population est assez facile une fois les papiers d’identité modifiés, mais gommer toute preuve de ses origines transidentitaires relève par contre de la mission impossible. Si le fait de faire mention de votre transidentité, que ce soit de votre part, du fait d’un tiers ou d’une institution n’a généralement pas de conséquences, il peut arriver qu’il puisse en résulter des situations de transphobie à votre encontre (discriminations, violences, harcèlement). La gestion de telles situations alors que l’on pensait en avoir fini avec toutes ces difficultés peut ainsi s’avérer déstabilisant. Ne vous laissez pas faire et défendez-vous. Des moyens existent pour vous défendre au niveau de la loi : justice, Défenseur Des Droits, syndicats, associations peuvent répondre positivement et vous aider en pareil circonstances.

Ne pensez donc pas que vous ne pouvez plus être concerné.e par la transphobie une fois votre « transition » terminée. En prendre conscience vous permettra de limiter un éventuel choc psychologique lorsque une telle situation se présentera en vous mettant face à la résurgence de ce qui devrait rester du domaine privé : votre transidentité. Vous serez alors plus à même d'avoir les bonnes réactions qui permettrons de vous défendre.